Friday, December 26, 2014

"La vraie liberté c'est le vagabondage"

Vingt ou vingt-cinq ans ont passé mais je garde un souvenir très clair de cette phrase, inscrite au bas d'une affiche sur le mur de la chambre de mes parents: une fenêtre rustique, ouverte en grand sur un paysage de campagne avec, au loin, des montagnes enneigées. L'affiche a depuis longtemps disparu, j'ai quitté cette maison en 1996 pour aller étudier à Toulouse et mes parents ont de toute façon déménagé deux fois depuis. Mais ces quelques mots et l'image de cette fenêtre ouverte sont encore présents dans ma tête comme si je les avais vus hier. En regardant en arrière, je ne saurais dire pourquoi ils ont marqué à ce point l'enfant puis l'adolescent que j'étais alors ; ni combien ils auront influencé celui que je suis devenu. Mais il faut reconnaître qu'il y a quelque chose de très fort dans cette affirmation.
L'affiche de Randonnées Pyrénéennes: vingt ans après, pas une ride!
D'abord, la vraie liberté. Pas n'importe laquelle, ni juste "la" liberté. Encore moins une de pacotille ou un succédané: la VRAIE liberté. Déjà que la liberté, c'est pas évident à manipuler comme idée, alors la vraie... pour un enfant de 8 ou 10 ans, ça doit peser lourd. Et si en plus c'est écrit sur un poster et épinglé au mur de la chambre des parents, ça risque bien de devenir parole d'évangile! La vraie liberté c'est le vagabondage, donc. Allons bon. Qu'est ce que c'est que ça? En voilà un mot mystérieux, qui perturbe, impressionne, suscite la méfiance. Le vagabond, c'est celui qui fait peur ou qu'on montre du doigt dans les histoires: sale et hirsute, tour à tour voleur de poules ou voleur d'enfants, il est taciturne s'il n'est pas franchement méchant. Du coup, on a vite fait d'imaginer le vagabondage comme une activité peu recommandable. La faim, le froid, les poux, la rapine... Alors, que celui-ci justement soit le chemin vers la Vraie liberté, ça fait réfléchir. D'autant plus que cette affiche, elle entre par les yeux, comme on dit outre-Pyrénées: la fenêtre ouverte, le ciel bleu, la campagne, les montagnes dans le fond... Le terrain de jeu est immense et à portée de main.

Cette affiche je viens de la retrouver sur internet. En la regardant aujourd'hui, je la retrouve en tous points fidèle à mon souvenir. Je remarque l'opinel sur le marbre de l'évier, le bénitier et le rameau au-dessus du calendrier sur le mur, le savon et la brosse dans son bocal en verre. Chacun de ces quelques objets évoque, raconte une histoire de vie simple, de gestes quotidiens, d'habitudes. Mais toujours le regard s'échappe - inexorablement - il s'évade, saute par la fenêtre. Il fait l'école buissonnière et prend le large... Comme pour nous dire que le vagabondage commence là, dehors, juste de l'autre côté du mur. Et que la liberté est une décision pas si difficile à prendre. Bill Hicks nous le disait carrément "it's a choice that you can make right now: between fear and love". Il s'agit bien de ça, au fond. Et plus je la regarde, plus je mesure à quel point la rhétorique de cette image est puissante, efficace. Même pour (surtout pour?) des yeux d'enfant. Je me dis que ce n'est peut-être pas un hasard si le vagabondage, si un certain vagabondage en tout cas, n'a cessé de me parler, m'attirer, me séduire ; que ce n'est peut-être pas un hasard si je suis ici aujourd'hui. Force est de constater que rien n'a changé: le vagabondage est peut-être bien la vraie liberté, la seule qui en vaille la peine, mais le vagabond a toujours la même (mauvaise) presse que dans les contes pour (grands) enfants.
Voleur de poules ou dompteur de poux, on l'appellera hippie avec raillerie et condescendance dans le meilleur des cas et traveler si son papa lui a acheté un VW California toutes options métallisé pour promener ses chiens et ses doutes existentiels entre Arcachon et Avoriaz. Mais pour la grande majorité, vagabonder n'est pas une option raisonnable, pas un choix sérieux. C'est tout au plus un enfantillage, un refus de grandir ou une fuite en avant. Marrant comme s'accrocher avec l'énergie du désespoir à un modèle de vie toxique et délétère en prétendant que tout va bien est au contraire présenté comme la voie de la maturité: étudie, travaille, consomme, endette-toi et surtout, ne remets rien en question! En résumé: sois un adulte. Il y a une phrase de Bernard Moitessier dans La longue route qui m'a beaucoup marquée (merci encore à Nico de m'avoir mis ce magnifique bouquin entre les mains!). Avant le départ, quand il veut faire comprendre à ses enfants combien il est important de suivre ses rêves, même si ce n'est pas facile, même si ça peut paraître dur à accepter ou à faire accepter: l'importance vitale de s'écouter, d'écouter la petite voix qui murmure dans la tête "parce que sinon c'est le troupeau". En montagne comme sur mer et peut-être bien dans la vie en général la vraie liberté, c'est décidément le vagabondage...

Pour s'en convaincre, il suffit de pousser la porte du (vrai) monde et de (re)mettre un doigt dans l'engrenage de la vie officielle. À ceux qui souhaiteraient tenter l'expérience, on conseillera de commencer doucement. Ils pourront essayer de mettre à jour leur carte vitale à la faveur d'une consultation médicale, par exemple. Ils découvriront que le nom de leur médecin traitant énoncé par un(e) employé(e) de la caisse primaire d'assurance maladie ne leur évoque absolument rien. Pas même le souvenir d'une vieille otite à la fin des années 90. Ils affronteront alors la dure vérité: les informations contenues dans leur dossier sont obsolètes! Aïe! Et c'est grave docteur? Plutôt, oui, car dans l'optique d'un futur et bien hypothétique remboursement de leurs frais médicaux (ils n'y ont pas mis les pieds depuis 2011, chez le médecin, mais on a vite fait de leur mettre sur le dos le déficit de la Sécu à ces fainéants...), ils devront apporter au plus vite des justificatifs adéquats. Ah, les justificatifs! Le mot est lâché. Ils sont d'autant plus indispensables au vagabond qu'ils lui sont inaccessibles. Essayer de remplir une déclaration d'impôts, d'ouvrir un compte bancaire, d'acheter ou de vendre un véhicule, de demander une attestation de résidence dans un pays de l'Union Européenne auprès du Consulat d'un pays tiers de la même Union Européenne, voire - pour les plus joueurs - essayer de faire toutes ces choses là plus ou moins à la fois dans les semaines qui précèdent Noël est un excellent moyen d'en prendre conscience. Sans un justificatif de domicile, rien de tout cela n'est possible. On a beau être citoyen et gagner sa vie (donc payer des impôts), sans une facture d'électricité on n'est rien. C'est là que tout commence et tout finit: le justificatif de domicile, nouvel alpha et nouvel omega de la religion bureaucratique. Vivre dans une camionnette ou une roulotte pose donc problème dès que l'on prétend rester un membre à part entière de la société et rien ne semble avoir été prévu pour faire face à cette situation, comme si elle ne concernait qu'une très petite frange de la population. Étymologiquement parlant: les marginaux.

En effet, depuis le Moyen-Âge, nous apprend Robert Castel dans ses volumineuses autant que remarquables Métamorphoses de la question sociale, les vagabonds ont posé problème. Leur sédentarisation fut l'un des objectifs des castes dirigeantes, à commencer par l'église catholique bien avant les seigneurs ou "l'État". Ainsi le recensement et le rattachement à une communauté locale, furent les premiers moyens de lutte contre le nomadisme et la liberté des individus. Être pauvre, passe encore - la charité permettant aux riches et aux puissants de se sentir bons et généreux (lire à ce sujet l'édifiante revue que fait Bill Gates du best-seller de Thomas Piketty, avec pour principale conclusion qu'au lieu de répartir la richesse pour réduire les inégalités, il vaut mieux laisser l'argent entre les mains des riches et compter sur leur penchant naturel à la philantropie! Vous je ne sais pas, mais moi ça m'a donné une furieuse envie de lui coller mon pied au c-à notre bienfaiteur de l'humanité). Pauvre oui, mais pas n'importe comment: pas un pauvre qui vit librement et voit du pays. Faut pas demander le beurre et l'argent du beurre non plus! Pauvre oui, mais enchaîné à un clocher ; pauvre local, connu et recensé. En un mot, un pauvre de la communauté. L'Église a donc inventé de réserver l'aumône aux seuls nécessiteux inscrits de leur propre chef sur les registres paroissiaux et ce, dès le XIIième siècle si mes souvenirs sont bons. Une société stable et prospère, comprend-on au fil des pages du bouquin, a davantage besoin de travailleurs sédentaires (d'autant plus prompts à payer des impôts et soutenir leur seigneur en cas de problème qu'ils s'y sentiront attachés), que de nomades libres (et éventuellement pauvres) qui vont et viennent à leur guise, au fil des saisons ou au gré des humeurs. Dans le même ordre d'idées, avoir un crédit sur le dos est une formidable invitation à la sédentarité et un vaccin à grande échelle contre la bougeotte - professionnelle ou géographique. L'ordre (et le contrôle) social reposent depuis longtemps déjà sur notre incapacité croissante à nous déplacer, alors même que les migrations sont habilement présentées comme les stigmates de la précarisation... Sauf bien sûr quand il s'agit de vider les campagnes pour entasser les pauvres dans des cages autour de centres, fussent-ils urbains ou commerciaux.
Pourtant, dans L'empire, Ryszard Kapuscinski nous explique avec une nostalgie délicieusement poétique que "certains croient que c'est poussé par la misère que l'homme se retirait au désert, quand il n'avait plus d'autre choix. Et ça a toujours été précisément le contraire. Au Turkmenistan, allaient au désert ceux qui possédaient des bêtes, c'est à dire précisément les mieux lotis: le nomadisme était le privilège des riches. [...] Pour le nomade, le passage à la vie sédentaire fut toujours un dernier recours, un échec vital, une dégradation. Un nomade, il n'y a que par la force qu'on peut le contraindre à la vie sédentaire: il y faut un impératif économique ou politique. Pour lui, la liberté que procure le désert n'a pas de prix." Allez dire ça au gars qui doit signer votre contrat d'assurance-auto: "Un justificatif de domicile? Non, je n'en ai pas vraiment... J'habite dans le véhicule. Oui, bien sûr que c'est un choix. J'ai un travail, oui oui. Mais un domicile pour l'instant, non. Voyez-vous, la liberté que procure le désert n'a pas de prix. Hum... Voilà."

En version espagnole, ça donne l'inscription sur le padrón municipal et c'est très amusant aussi. Chaque mairie de quartier peut en délivrer une attestation dont la durée de validité est de trois mois. Il faut pour ça fournir une quittance de loyer ou un bail ou une facture d'électricité ou de gaz. À la rigueur une déclaration d'hébergement signée par le propriétaire ou un locataire "légitime" du logement. C'est pratique dans une ville comme Barcelone où la plupart des gens de moins de 35 ans (dont environ la moitié est sans emploi depuis 2013, d'ailleurs) sous-louent des chambres et partagent des apparts sans aucune forme de contrat. Ça interdit d'office l'accès au remarquable système de santé publique gratuite, au droit de vote et à toute une flopée de services publics, ça complique terriblement toutes les démarches avec le Trésor, l'achat ou la vente d'un véhicule, l'acquittement des taxes et impôts correspondants, l'accès au statut de résident pour le stationnement dans la rue au tarif de résident (tarif prohibitif sans cela), le paiement éventuel des contraventions que l'on ne reçoit de toutes façons pas faute d'avoir pu fournir une adresse postale valide à l'Administration etc... Tout le monde essaye donc, un peu à la manière des chaises musicales, de trouver un appartement où un ami d'ami voudra bien rédiger une attestation d'hébergement bidon qui permettra de décrocher le sacro-saint padrón... On est loin du vagabondage mais c'est déjà très discriminant.
...ci de bien vouloir patienter... vous êtes en communication avec le service...

Ironiquement, on veut nous convaincre dans le même temps, que proposer des chambres en sous-location a-légale à la journée ou à la semaine, sur internet, grâce à une entreprise qui se siffle 5% ou plus sur chaque transaction mais sans aucune forme de prélèvement social, taxe ou "redistribution", sans cotisation ni couverture pour le loueur et sans aucun type de régulation, c'est chic et branché! Il y a même eu des cyniques pour baptiser ça "économie collaborative" et nous faire avaler que ce bed and breakfast aérien créait du lien et permettait aux uns et aux autres d'y trouver leur compte en arrondissant leurs fins de mois! Mais on parlera de ça dans un autre post... Pour exporter son véhicule vers la France (parce que, par exemple, on s'y installe et quitte donc l'Espagne), il faut présenter à un guichet de la Délégation Régionale de Circulation les justificatifs de paiement de l'impôt de circulation des deux dernières années et un certificat de non-gage. On peut les demander par internet ou à un autre guichet, mais ils seront de toutes façons envoyés à l'adresse postale enregistrée dans le système. Pas moyen de mettre celle-ci à jour sans un nouveau justificatif de padrón. "Mais enfin, si j'habitais encore ici je n'aurais pas besoin d'exporter mon véhicule!" En vain... De retour en France, on passera quelques délectables journées à faire la queue dans tout un tas de délégations et autres antennes de services décentralisés pour y recevoir des listes de pièces à joindre à tout un tas de dossiers et autres demandes de formalités simplifiées. La formalité simplifiée est une oxymore bien française qui n'est pas sans rappeler les explications de Jacques Chirac aux journalistes. Chaque fois qu'il disait "Laissez-moi vous parler franchement" ou "Je vais être tout à fait sincère avec vous, M. d'Arvor", on savait qu'il allait en lâcher une grosse... La formalité simplifiée, c'est une promesse de dizaines de pièces à fournir en double. Malheur à qui passerait la porte d'une sous-préfecture de province sans avoir fait une photocopie de TOUTES les pièces à fournir. Si votre slip a encore son étiquette Dim (ou Calvin Klein, hein, la lutte des classes n'est plus à ça près), faites-en une copie et joignez-la à votre dossier. Au fait, la photocopieuse à pièces du hall de la sous-préfecture est en fait une cabine téléphonique déguisée: elle est hors-service et avale irrémédiablement toute la monnaie qu'on est assez naïf pour lui confier.


De toutes façons c'est trop tard, si vous n'aviez pas toutes les photocopies au moment où on vous a appelé, vous avez perdu votre tour et le guichet va bientôt fermer. Demain ce sera exceptionnellement fermé et si vous attendez lundi parce que de toutes façons on fait le pont, l'extrait d'acte de naissance sera caduc, ou le contrôle technique, ou votre RIB, ou le ciel vous tombera sur la tête sans crier gare. Difficile de ne pas repenser à Terry Gilliam et son génial Brazil... De fait, il se peut même que vous vous retrouviez interné dans un centre de détention pour présumés terroristes, c'est arrivé à d'autres parce qu'on avait trouvé à leur domicile des dépliants avec les horaires de la SNCF, preuve accablante qu'ils préparaient un attentat contre les lignes de chemin de fer ou avaient en tête d'en voler les caténaires. Quelle meilleure illustration que de marginal à terroriste il n'y a qu'un pas: les banques européennes, dans une vaste opération de lutte contre le blanchiment de capitaux et le terrorisme, sont mandatées par les gouvernement pour demander à (comprendre "exiger de") leurs clients de mettre à jour leurs "données personnelles", qui incluent évidemment une adresse postale valide, mais aussi nom de l'employeur et revenu brut annuel (wtf???). Consternant, mais obligatoire. En signant le document que l'on est "tenu de leur renvoyer dans les meilleurs délais", on les autorise à croiser ces informations avec celles détenues par la Sécurité Sociale: pas de case à cocher, ni à décocher. Et ma banque se targue d'être la première banque "éthique, citoyenne et différente" d'Europe. Je ne la nommerai pas ici, il ne me manque plus qu'un procès en diffamation. Donc, avoir un compte courant mais pas de domicile fixe constitue en Europe un délit de faciès, ça, c'est fait. Alors que dans le même temps, le Bill Gates dont on parlait un peu plus haut offre - apprend-on sur Forbes.com - 65 millions de dollars aux banques pour "permettre l'accès à un compte courant aux pauvres qui en sont privés". Et de se répandre en éloges sur l'homme qui aura à lui seul éradiqué la misère, la poliomyélite et le désespoir (sic.). Le père noël philanthrope a encore frappé et je crois que je vais aller vomir...
vagabondages entre Navarre, Béarn et Aragon: au col du Pourtalet et au Cirque de Gavarnie.
Bon voilà, il ne nous reste plus qu'à éteindre la télé pour retourner le nez au vent sur les routes des Pyrénées entre Navarre, Aragon et Béarn, à attendre que la Guardia civil ou la Policia foral nous gratifient d'un de ces contrôles musclés dont elles ont le secret pour achever de nous convaincre du danger que l'on représente pour la (bonne) société et pour le sommeil du contribuable... N'en doutez plus, elle vaut son prix mais la vraie liberté c'est le vagabondage!

Friday, November 21, 2014

l'heure des bilans...

Voilà, ça y est: presque sans s'en rendre compte on vient de faire un tour de cadran. Un peu plus de 12 mois d'Un(t)raveling à bord de notre ford TRANSITion! C'est un peu comme dans le film de Kim Ki Duk: automne, hiver, printemps, été... et automne. En résumé et en chiffres, cette première année d'Un(t)raveling, ça donne un peu plus de 16000km à travers 6 pays (et 1250 litres de gasoil, soit 7,8 L/100km de moyenne), environ 25 sites d'escalade (dont certains, malheureusement, sous la pluie) et 8 chantiers-projets divers auxquels on a participé, à hauteur de dix à quinze jours chacun. On a gravi quelques sommets et trempé nos pieds dans quelques lacs de montagne, mais on ne compte plus les mètres de dénivelé ni les heures de marche. On a dormi par -7°C et dans la neige, on a été témoins de l'arrivée de la mousson européenne et on n'a en revanche pas souvent eu trop chaud.
Automne, hiver, printemps, été... et automne sur la route.
Sur la route et sous la pluie.
On n'a pas chômé (plus souvent contre le gîte et le couvert que contre rétribution en argent) et passé au banc d'essai quelques systèmes d'économie (et de vie) dite "collaborative": on a fait du wwoofing, du helpx, du volontariat, du bricolage et du DIY contre gîte et couvert, du couchsurfing, des chantiers participatifs, de l'apprentissage, du troc, du travail saisonnier, du freelance et même un peu de parasitage en bonne et due forme de nos familles et amis! On a vu pas mal de pluie tomber par la fenêtre et regardé pas mal de films pendant que la pluie tombait par la fenêtre: des bons et des moins bons... On a écrasé un nombre incalculable de moustiques et on a gratté un nombre conséquent de leurs piqûres malgré tout. Tout compris - on dit bien absolument tout compris - cette année de diesel, péages, tunnels et bacs, entretien du fourgon, assurance, contrôle technique, quelques campings, gîtes ruraux, refuges ou restaurants occasionnels, gaz, nourriture et boisson dont quelques tranches de basse-côte et bouteilles de vin rouge, médicaments et consultations d'ostéopathie sporadiques, pharmacie et cosmétiques, cartes postales, timbres, cadeaux divers et variés, souvenirs, mais aussi les factures du portable, laveries et pressings, achat de livres, de guides d'escalades d'ici ou d'ailleurs, musées, monuments, remplacement de fringues, chaussures de montagne, matériel de sport en général et de grimpe en particulier, sans oublier tous les cafés au lait, cortados et autres caffe latte, véritables sésames à débloquer les wi-fi d'ici et d'ailleurs... tout ça mis bout à bout, donc, a coûté 9360 euros TTC, soit 780 euros par mois, pour deux personnes, all inclusive, même le moins avouable et le plus futile.
Le deuxième petit déjeuner: au jardin et au soleil!
On a rempli le contrat qu'on s'était fixé: vivre à deux avec moins de 800 euros par mois, c'est à dire financer intégralement l'aventure avec notre travail sur la route. Et c'est un autre aspect de l'aventure dont on est très contents!

Et puis rendus là, on remercie évidemment beaucoup amis et famille qui nous ont accueillis tout au long du voyage, pour une nuit ou pour une semaine. Plus ou moins dans l'ordre et sans oublier personne (on espère): M. K. et la petite I., les vétos de StJPP, K. S. et los dos polluelos, X. et son coloc au pied du Xindoki, W. et ses petits plats à Burgos, la belle L. et ses colocs à Pau, U. et L., D. M. et le grand petit L. pour un passage éclair par la Catalogne, nos parents, le beau M., sa MC et leur petit U., D. L. et le petit Z., M., G. et L., le clan des furets (et pas des blaireaux!): B., A., E., L. et la petite M., notre brun ténébreux préféré, A. ainsi que sa charmante maman, Ch. et ses interminables journées de tonte, la fine équipe de Clémencelle (c'est où ça?), Ma et Ma, nos australiens adorés, J. et T. et notre chère G., M. et J. en escapade romantique et sans enfants à Sin City (mais aussi avec enfants et à domicile), Gi-Gi, leur famille et tous les membres de la confrérie de la porchetta pastorale.
Atelier, cuisine et salle de bain du chantier de Clémencelle (c'est où ça?).
Un grand merci aussi, bien sûr, à tous nos hôtes de CS, wwoof, helpx et chantiers de France, de Navarre et de plus loin - ceux que l'on a déjà envie de retrouver, ceux qui nous manquent, ceux que l'on reviendra aider avec plaisir et... les autres. Il y a aussi ceux que l'on n'est pas passé voir, ceux dont les dates ne correspondaient pas, ceux qu'on devait aller voir puis la route a changé et les quelques rendez-vous manqués. Rassurez-vous, on a adoré cette première année et on est bien décidés à remettre ça. Donc à tous ceux qu'on a épargné en 2014, vous pouvez trembler et préparer la chambre d'amis: en 2015, Un(t)raveling va venir squatter vos canapés, cuisiner des trucs super bons et repeindre ou réparer quelque chose. Be prepared... Oh yeah!

Naturellement, passer une année entière à deux dans les six mètres carrés de notre cher TRANSITion! et les espaces que nos hôtes ont voulu/pu faire pour nous dans leurs réalités quotidiennes respectives n'a pas été facile tous les jours.
Se sentir chez soi n'importe où, ou presque!
Le froid, la fatigue, la faim ou le besoin pressant d'une douche ont quelquefois pesé lourd dans la balance et on sait désormais qu'il ne faut pas se lancer dans de grandes discussions sur la vie ni faire des plans à long terme avec le ventre vide ou avant une douche bien méritée. Ça n'a pas non plus été difficile, hein, comprenons-nous bien. Mais il faut reconnaître que c'est un peu plus gourmand en énergie, en enthousiasme et en capacité d'empathie que d'arriver "chez soi", allumer la télé et prendre un café ou une bière. Maintenant, disons-le sans détour: c'est extrêmement satisfaisant et épanouissant, ça fait un bien fou et ça impose une discipline difficile à imaginer depuis l'extérieur, ou à l'avance... On a la sensation d'avoir énormément appris. Appris sur l'Autre, sur nous-mêmes et sur les relations entre humains ; sur les valeurs que l'on considère fondamentales et sur ce qui nous rassure, nous fait sentir en sécurité. On a la sensation d'avoir remis quelques pendules à l'heure dans nos habitudes et nos réflexes culturels ou sociaux. On a la sensation d'avoir remis en question (non sans quelques vagues ou quelques secousses) pas mal d'idées préconçues et d'a priori sur l'intimité et l'espace privé, sur le confort, la propriété et la consommation, sur la notion même de "foyer", "home" ou "hogar": un lieu où poser les valises, s'asseoir et respirer, pour quelques jours ou pour une petite heure à l'abri du tumulte et des regards. Un espace qui n'est plus forcément matériel, mais plutôt un sentiment ou - comme beaucoup l'ont ressenti et exprimé avant nous - un état d'esprit. L'odeur du Nangchampa jaune, cette couverture qui nous suit partout, qui signifie sieste sous un arbre ou après-midi d'hiver, ou encore les quelques classiques de notre bande-son, des thèmes qui nous accompagnent en même temps qu'ils nous transportent. "Ces poissons qui s'en vont, comme le thème au long du chant", authentiques merveilles de sagesse quantique, on sait qu'ils ont le pouvoir de transformer n'importe où en ici et maintenant et on est contents de les partager:




Mais réduire notre dépendance à la matière, aux choses et en particulier à celles que l'on flanque systématiquement - moins par nécessité que par habitude - d'un adjectif possessif: mon sac, ta voiture, notre salle de bains... ne veut pas dire que nous sommes devenus, ni en passe de devenir des corps subtils, des êtres d'éther, des gaz parfaits.
Une salle de bain avec vue? Non. Un abreuvoir récup' pour brebis rustiques.
On a eu froid, on s'est sentis sales, on a failli devenir dingues après avoir passé 8 jours sans se laver la tête, on a mesuré à quel point être fatigué ou avoir soif peut rendre susceptible et irritable, n'y revenons pas. On a craqué quelques fois et on s'est retrouvés en moins de temps qu'il n'en faut pour faire bouillir un oeuf dur, installés dans la chambre proprette d'un gîte rural ou sous la douche brûlante d'un camping en rase-campagne. Nos rares mais dangereuses descentes dans les villages les samedi après-midi, à la recherche d'une belle araignée ou d'une tranche épaisse de basse-côte, sont entrées dans la tradition orale des bouchers de France et de Navarre ; il en est même en Belgie qui gardent le souvenir de nos mines déconfites devant leur offre de beefsteack fin et gris comme les feuilles d'un missel... Voici donc un petit hommage, à quelques petits luxes, grands plaisirs et objets inanimés qui ont rendu possible (ou au moins facilité) ce non-voyage:
Même perdus dans l'hiver et la brume, on garde toujours l'espoir...
- la douche chaude est sans aucun doute le premier de la liste, qu'il s'agisse d'une salle de bains conventionnelle, d'un cabine de camping, d'une baraque en palettes sur un chantier ou de la branche d'un arbre en pleine nature. Dans ce dernier cas, on recommande vivement le compagnon nomade indispensable et ultra-léger : pocket shower de Sea to summit et son complément cuisine incontournable le kitchen sink. Minuscules et faciles à transporter pour se sentir partout comme à la maison... ou presque. On précise qu'on n'a aucun intérêt commercial à vous conseiller ces produits: ni Sea to summit, ni Google, ni Amazon ne nous paient pour vous en parler et on ne gagnera pas un centime si vous les achetez. Tout au plus on sera contents de savoir qu'ils vous rendent service autant qu'à nous!
- en seconde position juste après l'eau vient la lumière... On trimballe partout, dans le camion comme dans le sac à dos (et même pour aller escalader en plein jour) une paire de lampes frontales Tikka de Petzl avec piles AAA rechargeables, mais aussi une lanterne à LED rechargeable sur 12v, 220v ou grâce à sa dynamo intégrée. Sortir en pleine nuit sous la lune, armé de papier toilette et d'un piolet pour aller creuser une petite latrine entre deux taillis est sympa, mais pouvoir s'éclairer un peu le rend quand même plus facile. Sans parler de toutes les autres activités courantes...
Le sunday brunch version Futuna & Wallis. 
- se maintenir au chaud pendant et après l'effort devient un point critique quand on n'a pas vraiment de source de chauffage autre que biologique. Hum... Sans être des malades du matériel de pointe et de la technologie au service du sport, on a fini par reconnaître qu'un bon vieil Odlo ou Capilene sous un pull, c'est drôlement efficace. On a aussi succombé à ces fringues extrêmes qui réchauffent, ventilent, isolent, compriment, soignent, massent et semblent ne jamais se salir, à tel point qu'on les garderait 24h/24 pendant des jours, qu'on dormirait et se doucherait avec... un grand merci donc, à Adidas et aux Lacaunais qui enrichissent ou renouvellent régulièrement notre garde-robe! Encore une fois, on n'est sponsorisés par personne et on ne prétend pas faire de pub.
- enfin, une fois propres, au chaud et éclairés, on n'a pas besoin de grand-chose de plus: une tranche de basse-côte de Maine-Anjou ou de Parthenaise, plus parfumées que des races à vocation bouchère stricte ; un vin de pays pas cher (rouge et du coin, de préférence) ; un oeuf frit sur un peu de salade avec de la moutarde à l'ancienne, du fromage et le plat de choix pour le soir: soupe ou bouillon de légumes de saison, avec suivant les cas du speck, du miso ou du jambon de pays. On a aussi pris l'habitude, grâce à nos chers L. et R., de faire notre propre yaourt: on chauffe un litre de lait jusqu'à la température exacte de "quand on peut y tremper un doigt 10 secondes pas plus, pas moins, sans se brûler", puis on le laisse une nuit dans un thermos en métal qui contient encore un fond du yaourt précédent.
Euh... Ça se passe de commentaires, non?
Simple et délicieux, on le petit-déjeune les matins suivants avec un peu d'avoine et un fruit et on ne le garde même pas au frais: le contenu du thermos tient le coup trois-quatre jours sans problème! On a également adopté et adapté la recette des pâtes Sayin, un grand merci à notre cher U. pour son secret: les pâtes cuites sans eau! Directement dans la sauce de leur accompagnement ou dans la crème fraîche, on les laisse couvertes à feu doux et on n'a pas besoin de faire chauffer des litres d'eau que l'on jetterait ensuite, On recommande d'éviter avec les tagliatelles et spaghettis; y préférer des farfale ou torsettes... Et pour clore le chapitre plaisirs de bouche, comment ne pas mentionner le chocolat qui soigne tous les bobos, règle tous les conflits et accompagne toutes les séances de cinéma sous la pluie sous une couverture: l'exceptionnel Lindt au zeste de citron vert! (en plus, il est fabriqué à Oloron Sainte-Marie! Conso locale, ouais!) Et merci à D. et L. qui nous l'ont fait découvrir...

Il nous faudrait parler encore des livres qui nous ont accompagné, de ceux qui nous pesaient au fond du sac depuis longtemps et ont trouvé un écho ou un terrain favorable au cours de cette année d'errance(s), ceux dont la sagesse et la sensibilité ont réchauffé et éclairé, justement, notre route (s'il fallait n'en citer qu'un, ce serait Dharma Bums, de Kerouac). Et rendre justice à une célèbre enseigne de fast-food très bien représentée sur notre territoire, dont le wifi gratuit et illimité est si puissant que l'on peut parfaitement le capter depuis le parking. Le personnel y est remarquablement patient, qui nous sert en souriant deux cafés contre trois heures d'internet installés confortablement sur des banquettes design et ne refusent jamais qu'on branche l'adaptateur secteur. Il est vrai que le prix à payer est élevé: l'eurodance et le hip-hop poubelle de Fun radio et NRJ à fond non-stop! Mal de tête garanti à la sortie. Et puis c'est vrai que quelquefois, on succombe à une portion de ces petits bâtonnets de carton salés qu'ils appellent frites... Qui a dit qu'il fallait toujours être cohérent?

Sur un bac en Hollande. Noter à droite le pot de pâte de Speculoos, aliment prodigieux à la fois gras, sucré et salé!
En résumé: on a passé une année extraordinaire, la tête pleine de quotidiens toujours renouvelés, et on ne compte en rester là. Rendez-vous donc très bientôt pour d'autres aventures, d'autres projets et toujours des Welcome to et des Handmade with love! Et un immense merci aussi bien sûr à vous qui nous suivez, de près ou de loin, dans ces colonnes!

Friday, October 31, 2014

a very merry (un)birthday to... us!


Thursday, October 23rd 2014. A week left to complete our nomadic round-the-clock: twelve months on the road in our van TRANSITion!, living, working, volunteering, exploring and climbing. In a word, un(t)raveling... As we drove around Millau heading north-east to the gorgeous gorges de la Jonte, the mid-morning sun gave us a warm welcome. Medieval castles in ruins and gothic cathedrals of multicolour limestone emerging from the round green slopes, silver waters making their way through the bushes of oaks, wineyards, orchards and picturesque tiny villages. After last year's visit, it was indeed very nice to see the beautiful landscape around us with no rain, no mist, no fog. And quite exciting to discover a huge and almost too-good-to-be-true natural playground along the banks of le Tarn, la Jonte and - just a bit further, la Dourbie. "This time - Futuna said to himself as Wallis negociated a sharp curve before passing along the Bleu des Causses cheese coop - nothing will stop us from climbing!" Poor little thing, for thou did not know how true thy promise would prove to be...

the Gorgeous of the Jonte from the car park (and from left to right):
Capluc, le Révérend, Pégase, la Cathédrale, le Cirque des Vases, la Roche décollée and le Bitard.

Anyway, the twenty-five kilometer drive along la D907 finally took us through le R., a lovely village even tinier than the previous ones we had crossed, but world famous as the main entry and base camp to the gorges and their many climbing sectors. Behind the cross and ruins of le Capluc, stood in a quiet and wavy line of magnificent carved rocks the impassive shapes of Le révérend, Pégase, the Cathédrale, the Vases de Sèvre et de Chine, the Roche décollée, Le Bitard, La Licorne and Fusée. If many sport routes of all grades can be found along the gorges, these are particularly renowned for their multipitch climbing, tipically of 3-4 and up to 7-8 pitches, both bolted and trad. Despite the diferences in grade and style, most local climbs have in common their tough and old-school grading and equipment. Understand: when la Jonte's surprisingly expensive, vague and misleading climbing guidebook describes a V+ fully bolted route, you have to be prepared for anything ranging from a V+ fully bolted route to an exposed strenuous tricky 6a+ with 5 spits in about 30 meters (true story!). But any local would tell you this is the unique, second-to-none charm of la Jonte: its old school touch and thrilling big time adventure flavor... This statement is even the very introduction of the guidebook, poorly translated in no less than five languages. Printed in a drooling festival of black-and-orange Halloween-like confusing jumble of text and drawings, the authors explain "this second edition paid for 6 years of equipment and maintenance of the climbing sectors". No kidding! With a spit every 5+ meters, I bet the 25 euros of one sold guidebook are enough to equip a whole sector... Anyway, we'll have many opportunities to complain about this tough guys' philosophy during the next few days. As a french climber and blogger says (link below): "A la Jonte, il faut savoir deux choses : premièrement, on n'y va pas pour poser des dégaines mais pour grimper (dicton d'un grimpeur anonyme). Ensuite, "équipé loin" se dit "équipé athlétique". Quand on sait tout cela, on est armé!". But let's make a fresh start and enter the thick of it: a whole week of climbing un-birthday celebration under the sun!

from the second belay of Les femmes et les grimpeurs...
Day one: just a little bite! Les femmes et les grimpeurs d'abord (90m - V+/6a) is a perfect introduction to climbing in la Jonte. Nice and easy, comfortably bolted but it gives you a taste of what to expect: air, views, vultures and fine climbing... A special mention for the beautiful last pitch, steep and straight up the wall to the foot of the gorgeous Vase de Sèvre. While abseiling down the neighbour Crise éléphantine, a couple of climbers passed us along in a narrow trail equipped with wires and fixed ropes and got to the ground in less time than we needed to unravel the jammed ropes. Many thanks to the f---ing local guidebook that says: "descent abseiling the 2 pitches of Crise éléphantine" without mentionning the easy and comfortable via ferrata-like trail!
the line of Les femmes et les grimpeurs ; a happy family at the second belay ; the mom in the last pitch (V+/6a).
Day two: just a little bit! following the advice of an unknown but friendly and talkative would-be-local from Montpellier, we headed to the left side of le Bitard sector to try one of his must do's: the long traverse of La diagonale du gogol (140m - 6a+) that passes all the way behind the Roche décollée, to end up far left in the Cirque des Vases, pretty close to the Vase de Chine. The first two V pitches climb straight up an easy wall, where falling is not a concern but not an option either, because of the air between the bolts... The third one (V+) is a steady traverse passing in the shade of the Roche décollée, expertly lead climbed by Wallis who complained a little bit about the greediness of the avarice of the equipment. The fourth pitch and main course is a short but very steep little 6a+ wall with a couple of awkward moves to get off an overhanging slippery crack. Powerful and not too easy to read, it took Futuna two attempts to get rid of the crux and make it to the belay. Fifth pitch is another V+ traverse with fewer bolts than you'd dream of (and expect) that takes you to a breathtaking balcony with a view. And last but not least, the most enjoyable pitch crosses the slick face of a dihedral before climbing all the way up its twenty meter central overhanging crack, powerful and pleasant. Once she got to the top, Wallis declared something like "I understand the name of the route, now. The diagonale is quite obvious, but you do need to be a gogol (a retard) to wanna climb or recommend that!". Ha ha ha. Back down to earth, we took the van to the Belvédère des vautours car park and needed nothing but a warm-ish "solar" shower and a plentiful pasta with cheese and red wine to call it day and go to bed early! While climbing and particularly when Wallis leads or when Futuna is suffering, we do not always take the camera off the backpack. Here is a link to a very nice climbing blog (in fwench) with nice pictures of this route and some more we also climbed here and there... I guess we should ask them how they deal with shooting and chasing pics while they lead climb, because I often refuse to take the risk to break our dear little Lumix as I did with the former (and way less sexy) Cybershot.
enjoying a short rest in the sun and stretching the finger toes at the fifth belay...
the amazing views from the last pitches of the route: the Roche décollée (left) and the Vase de Sèvre (right).
Day four: just a little bight. after a 24 hour break of uncertain weather, social networking, remote tele-conferencing and climbing gear hunting down in Millau, we took no risks on the cloudy morning of this fourth day and headed to the easy and enjoyable Le Révérend (110m - V+). Classic among the classics, the route does not have a single tricky move or crux, although some sections (especially the traverse in the second pitch, a decent V) are bolted with a bit of distance. This can be a bit of a problem for climbers who try their first multipitch and are used to sport bolting. Generally, most routes at la Jonte require you to be comfortable in the grade you climb: we successfully tried up to 6b - a fall or mistake can be pretty scary - but had to give up the nasty 6c pitch of the route just right of Le bitard (if you post us the name of the route, we'll send you a postcard from somewhere as a reward!) because the next bolt proved impossible to reach (for us). Anyway, back to the topic... Last pitch is a beautiful, nice and very fun thick crack taking you to the top of a needle just a few meters below the summit of le Révérend. What a nice and aerial, high mountain atmosphere for such a short and easy climb! It started to rain just as we prepared the rope for abseiling down, so we decided to safely hike along the Jacques Brunet trail towards Capluc, then back down to the start of the route and to the car park (about an hour in total). Shower, lunch/dinner and the begining of our F.F.Coppola cycle with "The godfather I", in bed with double blanket and a cup of tea! Al made us an offer we couldn't refuse...
the line of Le Révérend from the GR trail ; Wallis reaching the third belay ; the view of beautiful La cathédrale.
Day five: just a little B (plan)? We were determined to climb Biotone and Crise éléphatine at the Cirque des vases. When we got at the foot of the first one, two rope parties were already stepping each other's fingers in both of them. We thought of La gueule du look as a good alternative, walked there only to find a rope party about to start. Plan B aborted. We followed the gorge, talked with the providential moustache-bearing-former-neighbour-of-Futuna's-sister-who-happened-to-be-climbing-there-on-that-day and he recomended we tried another easy classic among the easy classics: Le bitard (100m, V+), combined with À nous la légion, a tough two-pitches (an impressive V+ traverse and a hard 6a diagnoal crack), with the cherry on top: a overhanging abseiling down from the top of the route back to the summit of Le Bitard. We got there as a young couple started the route and waited for about 45 minutes: too tired to walk and too lazy to look for a plan D. The first four pitches (Le Bitard) are easy and, yes, really easy. Nice pockets and holds all along, a surprisingly varied rock - particularly beautiful in the second pitch - a slightly more physical, continuous section along the third pitch and an impressive patio with stunning views and vultures on the rock* to get to the top. The combo with À nous la légion is worth it, but not too much. Jumping from the top of le Bitard pilar to the main wall, with nothing but the rope on your shoulder and the belayer sitting behind you is but an aperitive for the poorly bolted 25 meter traverse along a thin ridge: first to be used with your feet, then (once all hand holds have suddenly disappeared) lowering as you can to hang to it with your hands and traversing with your feet in the void... But this is tipically worse for the second, so I won't complain. The 6a pitch is, sorry to say, hard for the grade: working your way along a diagonal crack on a very steep and eventually overhanging wall, hands and eels desperately searching the round lip for a hold. And as you'll guess, not too many bolts... Once you reach the top, your reward is a 20+ meter overhang to abseil down, what the Fwench call a fil d'araignée ("spider wire"), hanging from the ropes with no body part touching the wall, with no other option than spinning around weirdly until you eventually land on the small flat terrace of le Bitard. The friction hitch gets very hot as you fail to decide whether it's better to hurry up or to slow down... You should have seen Futuna's face!
classic Le bitard: nice and easy second pitch, impressive traverse of the fifth pitch and about to abseil down from the top.
Day six: after talking with several climbers and observing a couple of rope parties struggling with the route, we decided NOT to climb the mythical Arête ouest of la Roche décollée and chose, instead, the straight line of La gueule du look (120m - 6a), a long scar that goes all the way up the south face of la Roche. We had heard the first pitch was long and the crappy local guidebook mistakingly showed the first belay anchor much lower than it actually was. We had heard a fifty meter rope was slightly too short and thought a sixty meter one would do the trick. After a nice promenade up an alpine-style crack, Futuna got stuck with just a few meters of rope left and no clue about where to expect the belay anchors. He felt lucky already that the line was extremely clear (follow the crack, follow the crack, follow the crack), because each next bolt could in no way be seen with bare eyes!
a party up La gueule du look, at Roche décollée.
So, after an improvised belay was set a about 55 meters from the ground (a long sling around a boulder, a bolt and a comfrotable ridge for the feet), Wallis got up a good ten-to-twelve meters to an old, rusty anchor you would never use, unless explicitely told to (in a route description on a guidebook, for example). From there, she belayed Futuna up the last few meters of this exhausting 60 meter first pitch of a fairly easy 6a! The rest of the route was of the exact same "follow the crack" style, with distant bolts and an invisible second belay, hidden deep inside the crack... Even with this one, we completed the route in three pitches and still wonder what the actual sequence should be. Anyway... The last pitch was a lot of fun, especially when the crack opened wider and deeper, requiring you to sneak inside then choose your side. These last ten or fifteen meters had plenty of most welcome amazing holds and pockets, where one put their hands with great joy and relief, only to discover they were litterally full of vulture poop. Yummy! Once you reached the top, the way down was easy from the north side of la Roche: a short section abseiling down from an old oak, a steep trail and another comfortable section abseiling down to the ground, very close to the start of l'Arête. Hungry and tired, we decided to make the most of the day and headed straight to Biotone (90m, 6a+), which we climbed with haching feet and extreme thirst. Futuna managed to miss a belay again, resulting in another 50+ meter pitch that left him devastated. Wallis leadclimbed the last pitch and had the honour to settle at the surprisingly uncomfortable last belay, while no pictures were taken during the whole ascent... Long story made short: 200+ meters in 8 pitches of a generous 6a under a bright sun, a lot of complications and confusions with almost no water, but two beautiful and highly recomendable routes, indeed!
la gueule du look: the line, the way up to the "first" belay, the "second" belay inside the crack.
the last meters of the last pitch: watcha where where the vultures poop and don't you...
Day seven: determined to play a vibrant finish to this climbing symphony in spite of our state of fatigue, we woke up late and headed to the deepest part of les gorges, after a couple of young enthusiasts told us about Gallo loco. But we needed more, or so we thought! We ended up climbing L'air du temps (140m, 6b) instead. After a surprisingly hard first V+ pitch (did we miss something there?)combined with the second one (a nice V) to try and save some time, the third one was a beautiful 6a crack. Quite physical but really enjoyable, it only served to prepare us for the big piece of meat: a thin and technical 6b whose crux came right between the last bolt and the belay, By the way, why the hell were they so distant? A nasty and very long lateral move, with virtually no feet at all and nothing but a slippery roundish piece of crap for the right hand took Futuna a couple of attempts and a good fall before clipping the anchor. Fifth pitch was a short chimney followed by a short traverse to a cozy terrace. The last and sixth one would have been the average nice and easy 6a, if only Futuna hadn't mistakingly climbed the first half of the neighbour overhanging 7a+, resting at each and every bolt and thinking something like "Ford! I reckon I'm tired but this 6a is probably the hardest I've climbed so far". Ha ha ha... Let's be honest and recognize that the marvelous local guidebook clearly says you "have to be careful there and head to the left in order to follow the route"... We reached the top, drained and happy, walked along the cliff until the comfortable anchors and abseiled down with the sunset, enjoying the daylight until the very last minute, had a delicious last warm-ish "solar" shower and plentiful pasta with cheese and red wine, and happily called it a week!
l'air du temps: the (hard) fourth pitch, the last meters of the last pitch of the last climb and the way down.
Epilogue: the story behind the story. On the morning of the second day, Futuna woke up with a sore shoulder but decided to say nothing and keep climbing. "It doesn't hurt while I climb, he said to himself, so if I keep climbing, it's gonna be alright". Poor simple-minded ingenuous little thing... As our readers can imagine, it only got worse as Futuna stuck to his promise to climb, climb and climb as long as the sun would keep shining. Almost one month and 3 osteopathy consultations, he still has his left arm tied to his chest, does nothing but social networking, blogging and online press reading, and accepts the opioid pills his mother offers him every other night to get some sleep... But hey, after a rainy year of unclimbing frustration, what would YOU have done in his place?


* Because they've been with us and around us all the time during these seven days on the rocks,
we want to give our warmest thanks to the feathery team of the vautours fauve (Gyps fulvus) of
the Gorgeous of the Jonte. Your support and presence were most appreciated, fellahs! 
Here are a few pictures of them, from us to you:

Thursday, October 23, 2014

in the mood for... crumbs!

bad weather and snowfall found us at around 3.000m on the Tofana di Rozes, and that's how we met a lovely new friend...

On the 7th day of our Dolo-mythic diet, pretty exhausted, running out of food and dying for a warm shower, we decided to go for one extra hike before heading down to civilization and rest. After a short and cold night on the rifugio Dibona car park, we left early to climb up the beautiful (and challenging) fia ferrata Giovanni Lipella, which goes all the way up to the Tofana di Rozes (3.225m), through WW1 rusty ladders and pitch-dark tunnel only to take you across steep rock faces and exposed scree slopes... We found some ice along the route, some real bad weather and got in the middle of a (mild) snow storm, making us actually a bit nervous about escaping and safely reaching the rifugio Giussani safely.

Nat King Cole featuring the Alpine Chough.
You can find some pictures and a more detailed description of the adventure here, even though we wrote that post in French and Spanish (automatic translations in English-French-Spanish are available by clicking the flags at the bottom of each page of the blog and - we won't repeat it enough: google automated translations can be really funny!). The whole adventure was nice and worth it, despite the tense moment(s) hanging to both the life-line and a poor weather forecast... We needed a break and stopped at the rifugio for a little pause: two warm caffe latte helped and as we took out some biscuits from the backpacks, suddenly, in the loneliness of this stormy, ice-cold day of September, at 2.580m, this little fellah appeared out of nowhere asking for a treat... We grabbed the camera and started to film its flirting with us and couldn't help laughing all along as it came closer, took some food then backed-up on ly to come closer again for another bite... The video is short and we basically edited nothing at all (sorry for this: it's not that we are lazy, we just don't have a clue how to edit videos, except for adding music, trimming, fading and writing down some credits. If you're into video editing or film-making and want to share/exchange habilities, get in touch with us!). The soundtrack came to us as a pretty natural thing, since the charm of this Corvidae was magnetic and its little parade seduced us. Not being judgemental here but, this boy id pretty fat and we reckon we weren't its first feeders up there, ha ha ha! Dude's experienced!

Anyway, here it goes, hope you enjoy it:



Thursday, October 16, 2014

Chaton vert

El chaton vert tal y cual.
Había una vez un gato por cuatro que vivía entre coche y coche en la plaza del castillo en lo alto del pueblo. Pasaba sus noches a los pies de una piedra tallada de la muralla o en el techo de un suzuki descapotable contando cuentos a quien quisiera escuchar. Solía decir a menudo: – los extranjeros tienen muchos defectos, pero una gran virtud y es que no se quedan! Lo que está claro es que con nosotros se equivocó: le dimos la lata un par de noches al pie de un anfiteatro de piedra, con buenas vistas a la luna llena de octubre. Eso si, nos hicimos pequeñitos para no llamar la atención de nadie más que él...

Pero de día, entre el rico yogur con cereales de la mañana y la rica sopa de verduras de la noche, nos escapamos al muy cercano Val de Sourn para susurrar al oído de las paredes. Ejem... Este trozo de verde en el paso más estrecho del recorrido del río Argens es un lindo rincón para escalar. Desde apenas el espacio justo para arrinconarse al borde de la carretera sombría, el escalador necesitará el tiempo de un suspiro para llegar al pie de las vías. Estas resultan largas, contínuas, entretenidas, bellas y pobladas de paisajes de otros planetas gracias a las formas que se dejó hacer esta caliza blanda y amarillenta del Château. Los numerosos parquins (muy limpios) aprovechan cualquier curva del río o pequeño circo de la pared y permiten alojar las multitudes de aficionados que llegan al Val por autobuses enteros. Si si, ya verán! La pernoctación queda estricta- y clara-mente prohibida - como la acampada, el bibac o la celebración de asados salvajes. Pero aún así, algunas mesas de picnic en una playa de césped tierno invitan a la masticación y la deglución contemplativas. Y si sus tripas lo requieren podrá el escalador, apenas caminando unos metros, liberarse del peso de la existencia en unos lujosos y modernos váteres secos que la consejería regional ha puesto a disposición de los visitantes. Allí bajo sus pies - y mediante un ingenioso dispositivo patentado - unas lombrices de California esperan sus donaciones para compostarlas sin prisa, pero sin pausa.
"Desde la carreterra hasta el pie de vía ¡menos de un minuto, tronco!"
Para nuestra primera mañana por allí, sin guía y sin mucha idea, contábamos con alguna cordada para recomendarnos unas vías, o mejor incluso, dejarnos ojear su guía. Pero no encontramos una cordada sino unas quince o veinte esparcidas por la pared. Como hormigas en su rusco (no pierdan tiempo con detalles, los autores de este blog son veterinarios y sus conocimientos antomológicos son de fiar…), jóvenes de constitución sana y de pelo muy corto subían y bajaban todo el rato de un gran autobús azul oscuro con el siglo del Armée de Terre, subían y bajaban todo el rato por los 50 metros de camino empinado, subían y bajaban de todas las vías de alrededor en un zumbido aturdidor. Buscamos al que parecía ser su reina: un señor de edad respetable con pelo plateado y gafitas progresivas colgadas del cuello, a quien todos decían "Si Major!", "No Major!" o "Las 10 y cuarto Major!". Le saludamos y le preguntamos un par de cosas, hasta que no solo no prestó unas fotocopias de la reseña sino que al cabo de un rato, cuando un chaval se lo devolvió, nos pasó el documento original.
Un V anónimo pero que no dejaba de subir y subir y Le fil d'Ariane.
Así pues pudimos probar en compañia de la tropa unos V+ cortitos y de canto, pero ya con desplome. Luego encadenamos un par de 6a de 28 y 32 metros: Banlieue rouge et Bagarèdes, muy agradables por tener pasos con desplome pero siempre buenos cantos y movimientos muy naturales… Para confirmar todo lo que ya pensábamos de los grupos y cursos multitudinarias, saturando la roca con cordadas de gaviotas verticales (fuesen del UCPA o del propio ejército), un chaval fuertote se dio la molestia de arrancar y tirar un pedrote del tamaño de un bebé rechoncho, que vino a estallar justo entre dos de sus camaradas a quienes el Major estaba haciendo una interrogación sorpresa. Cambiamos de sector y luego este mismo día, tras una merecida pausa para comer y hacer siesta, conocimos a un par de suizos muy simpáticos que nos recomendaron Arielle, 6a+ de 37 metros recientemente regraduada a 6b. Preciosa, variada, bien protegida pero sin exceso, con pasos técnicos, laterales de coco y desplomes con pasos de bloque; todo eso sin mucho espacio para descansar entremedio: una vía de primera y hasta la fecha uno de los encadenamientos a vista que más feliz pusieron a Futuna!
En lo alto de la arista este, ole pues! y la línea de Arielle.
Al día siguiente, nos dio por probar otra zona aún más cerca de la carretera. Prácticamente se podía asegurar sentado en la cama! Después de un par de 6a y un V+ de dos largos encadenado de un tirón por Wallis, seguimos la línea elegante y aérea del Fil d'Ariane 6a+ antes de sufrir en Verglas d'été, un 6c+ plaquero infernal. Cayeron luego Indiana Jones , 6b+ a vista y Paf le chien 6b+, cuyo resalte final se resistió. Un par de intentos poco dignos en El dülfer del enano de los acantilados, 6a (???) nos confirmaron que el grado es algo muy relativo y que lo importante es el gesto. Bueno, y el disfrute. Bueno, y participar, por supuesto.

A la noche, después de unas duchas prohibidas en un rincón de los parquíns de la zona (y con jabón ecológico, no vayan a pensar que dejamos rastro…), volvíamos al encuentro de nuestro gato (que cada noche se sorprendía de vernos volver, nosotros extranjeros!) para escucharle los cuentos.
Cuenta la leyenda que las cigüeñas se solían quedar en la Provence hasta finales de otoño.
Por todas partes se escuchaba una algarabía de picareos: vacaciones en África!! y en lo alto de los campanarios, estas aves de modales exquisitos terminaban de preparar todo, dejando el nido tan recogido que los pobres campanarios se quedaban desnudos a la merced del invierno. 
Así fue como algunas campanas decidieron hacer también las maletas y se fueron al sur.
Sin poder contar las horas, los días de invierno se hicieron largos para las gentes del pueblo. 
A la primavera siguiente, volvieron las cigüeñas pero las campanas no. Así, las gentes del pueblo tuvieron que fundir unas nuevas y decidieron enjaularlas.
Desde entonces, las campanas de la Provence dejan de dar las horas en invierno como protesta por su arresto domiciliario.